Une pause bosnienne/herzégovienne

Je vous téléporte dans le futur en mettant une pause a notre épopée croate.
Je me rappel très bien d’une rencontre qui m’avait marqué il y a 4 ans. Celle de Delphine, une guide chez Karavaniers, une agence de voyage Montréalaise. C’est une des premières, sans le savoir, qui m’a donné le goût de partir en vélo. Delphine a voyagé seule, a vélo, pendant près de 6 ans en Europe, Afrique et surtout dans la région himalayenne. Au cours de ses années, elle avait appris a parlé népalais, dzongkha (langue au Bhoutan) et hindi. J’avais été littéralement fasciné par ‘énorme bagage qu’elle avait. Avant de la rencontrer, je me disais que les langues asiatiques étaient trop difficiles et je me contentais seulement de dire le classique « bonjour » dans la langue appropriée. Après sa rencontre, je me suis dit que si elle était capable de le faire, pourquoi je ne serais pas capable? C’est alors que je me suis mis à apprendre, à chaque jours, quelque mots de népalais que je pratiquais le plus possible. Me voilà à demander à tous les gens que je croisais « comment ça va? », « il est quelle heure », « tu viens d’où? » (Il faut comprendre qu’au Népal c’est une question classique en montagne de demander d’où la personne est partie). Et la réaction est incroyable. Très peu de touristes se forcent à apprendre le népalais. Et je continue à faire la même chose peu importe la langue où je suis.
Ceci étant dit, j’avais demandé à Delphine si elle avait un coup de cœur dans les pays qu’elle avait visité en Europe. Elle m’avait alors répondu la Bosnie-Herzégovine. Je m’étais dit qu’un jour j’irais visiter ce pays. Mais bon, ce n’est pas tous les jours qu’on prévoit visiter la Bosnie-Herzégovine. Déjà faut être capable de prononcer le nom du pays sans s’enfarger. Nous voilà donc en Croatie, à quelques kilomètres de la Bosnie-Herzégovine. À force de rencontrer des gens, tout le monde nous parle en bien de ce pays. Je n’ai jamais entendu une personne en parler en mal. Je ne me voyais pas ne pas y aller!! Donc, petit détour pour aller visiter Mostar en Sarajevo. Un pays fascinant qui a vécu une (peut-être même LA) des dernières guerres du 20e siècle. Effectivement, qui dit Bosnie dit guerre de Bosnie. Est-ce qu’on voit des vestiges de la guerre? C’est impossible de ne pas en voir. Trous de balles un peu partout sur les murs des bâtiments. Impacts d’obus au sol (que la ville a remplis de résine rouge pour se rappeler que des gens sont morts ici), bâtiment à l’abandon ou complètement démolis en plein milieu de la ville sont quelques exemples des vestiges que l’on peut voir de la guerre.
Ça devient vite complexe lorsqu’on demande les raisons de la guerre. Complexe parce qu’à l’époque de la Yougoslavie, trois peuples ayant trois religions se côtoyaient amicalement: croate catholique, serbe orthodoxe et bosnien musulman. Pour des raisons économiques/territoriales, certains pays sont devenus indépendants et la guerre a commencé pour obtenir la Bosnie-Herzégovine. Bon, c’est un résumé extrêmement concis, mais l’histoire est beaucoup plus complexe et varie en fonction des gens que l’on questionne. De nos jours, il y a encore des croates, serbes et bosniens dans le pays et chacun a une religion différente ce qui fait un pays avec une administration extrêmement lourde. Par exemple il y a 3 compagnies d’électricité ou chaque ministère est multiplié par trois. Ils sont trois présidents chacun représentant les croates, serbes ou bosniens. Chaque personne vote pour un seul des présidents dépendamment de l’endroit où ils habitent. Dans les écoles, les enfants sont séparés puisqu’ils n’apprennent pas la même langue… Mais la langue est pareille!! Le croate, le serbe et le bosnien, aucune différence. C’est seulement l’accent qui est différent et quelques mots. Un peu comme le français du Québec et celui de la France. Ce qui est drôle c’est que sur les paquets de cigarettes, par exemple, les avertissements sont écrits dans les trois langues. C’est-à-dire trois avertissements écrits de la même façon pour montrer que les trois peuples sont pris en considération.

Après une courte visite de Mostar, nous partons en bus vers Sarajevo. Pourquoi en bus? Parce qu’on est au mois de février et qu’il y a eu des jeux olympique d’hiver a Sarajevo en 1984, ce qui veut dire de la neige et des montagnes. Qui dit neige dit sel et qui dit sel dit rouille sur les dérailleurs des vélos. Si on peut éviter, on évite.
Sarajevo est une petite ville assez tranquille, du moins en février. C’est plutôt un gros village qu’une capitale. On en profite pour faire un tour avec une agence de voyage qui nous amène visiter le tunnel qui a permis aux habitants de Sarajevo de survivre durant la guerre. Sarajevo a été assiégé durant environ 4 ans ou en moyenne 329 bombes ont été lancées sur la ville. Durant la pire journée, il y a eu 3777 bombes. Pour obtenir de la nourriture et autres produits, un tunnel de 800 mètres menant à l’aéroport a été creusée. Ce tunnel a permis de transporter des marchandises pour les citoyens et une dizaine de mètres est accessible pour les touristes. Ensuite, nous avons visité un hôtel de luxe qui a été construit pour les jeux olympiques. Malheureusement, la guerre l’a fortement endommagé et l’hôtel est à l’abandon depuis. C’est assez impressionnant de voir une structure aussi grosse être laissé en pleine nature sans l’entretenir. C’est la même chose qui est arrivée à la piste de bobsleigh qui est un endroit particulièrement apprécié par les artistes venant y faire des graffitis. Par contre, la piste est encore utilisée l’été pour de la luge.
Finalement nous sommes allés visiter le War Childhood Museum. Un musée où les enfants de la guerre ont donné des jouets qui ont été significatifs pour eux durant la guerre. On peut donc voir cet ourson en peluche avec cette inscription:
I don’t remember my brother. He was only little bit older than me. They took him from my mother’s arms and killed him. We fled from our home without a chance to lock the door behind us. Then we lived in a refugee camp. This blue bunny was the only thing that brought me joy. Its color and smile brightened the gloomiest days. I donated the rest of my toys, keeping only my bunny.

On peut également voir une lettre écrite à la main et l’enfant qui avait 5 ans à l’époque explique que sa mère était en train d’écrire lorsqu’il a entendu une explosion. Elle est décédée et n’a jamais terminé sa lettre. J’avais 4-5 ans à l’époque où la guerre a commencé. J’étais loin d’avoir les mêmes préoccupations à cet âge.
Finalement, en soirée nous sommes allés avec le couple de couchsurfeur qui nous héberge dans un ancien cinéma (Kino Bosna) utilisé maintenant comme un bar avec de la musique live. Des gens entre 7 et 77 ans se retrouvent sur place et un groupe local se promène de table en table à jouer de la musique. Tout le monde connait les chansons par cœur et les chante. C’est fascinant de voir ce genre de chose. Je ne vois pas trop ça au Québec, des chansons que toutes les générations connaissant et chantent en même temps d’une façon aussi patriotique. À force de discuter avec les gens sur place, on commence tranquillement a voir une différence sur les façons de penser. Une des premières questions que le couple qui nous héberge m’a posé était de savoir comment je pouvais faire pour partir voyager. Il me demande si je n’étais pas stressé de ne rien trouver comme emploi à mon retour. Pour lui, avoir un emploi est tellement précieux qu’il ne se verrait pas partir. Le pays a près de 40% de la population sans emploi. Ceux qui travaillent ne veulent pas quitter leur emploi. A mon avis, c’est loin d’être ma dernière conversation de ce genre.
On ne pouvait pas quitter Sarajevo sans manger les fameux Ćevapi (prononcer tchevapi) ou Ćevapčići (prononcer tchevaptchitchi). On nous en parle depuis la Slovénie qu’il faut absolument goûter à ça. C’est une recette typique de la région. Un pain ressemblant à un pita avec des morceaux de bœuf ressemblant à des saucisses, des oignons et du kajmak (une genre de crème). Excellent! Mais très lourd comme repas!


Nous repartons en bus vers Mostar pour quitter la Bosnie en vélo vers la Croatie. Près de la frontière croate, nous traversons des champs de mines. On en entend parler souvent, mais c’est assez spécial à voir en vrai. À certains endroits ils ont mis des rubans pour délimiter les zones minées. Par contre, on ne sait pas si les mines sont à l’intérieur des rubans ou si l’intérieur des rubans est sécurisé. Peu importe, les locaux nous ont averti, pas de camping sauvage en Bosnie-Herzégovine sans parler avec les gens de la place qui savent les endroits minés. De retour dans la région Herzégovine, je demande à un monsieur qui nous héberge comment les gens s’identifient ici. Parce que le pays est Bosnie-Herzégovine, Sarajevo est dans la région Bosnienne et le sud est la région Herzégovine. Et c’est long à dire Bosnien-herzégovien et je ne sais même pas si ça se dit! Je lui demande donc si les gens de la région se considèrent bosnien. Houlala, il me dit de ne jamais leur dire ça. Ni de dire qu’ils sont yougoslaves. Je lui demande alors comment il s’identifie. Jusqu’à ce jour, je n’ai pas encore eu de réponse. Il ne savait pas trop comment se définir












La Bosnie-Herzégovine a un potentiel touristique incroyable. Beaucoup de montagnes, rivières et lacs. Malheureusement, je pense que le fait qu’il y ait des mines un peu partout empêche le développement du tourisme. Ceci étant dit, ce court passage dans ce pays m’a donné le goût d’y revenir un peu plus longtemps et explorer la campagne à vélo. Peut-être dans les prochaines années.
Merci pour ce cours sur la Bosnie dont je ne savais pas grand chose. Les photos sont elles aussi très belles.
Je devrais suivre un cours également, c’est compliqué toute cette histoire là. Par contre, ça m’a donné le goût de suivre des cours d’histoire à mon retour au Québec!
Le photos parlent d’elles même ,beau reportage tu devrais repenser ta carrière comme journaliste.
Ahah! Recommencer un 4 ans d’université 😉
Ce pays a l’air tellement triste et nostalgique.
Le pire, c’est qu’il y a un potentiel énorme avec la nature et tout, mais le système est tellement complexe que le pays a de la difficulté à bâtir quelque chose!! Je crois, par contre, que dans les 20 prochaines années, on va commencer à entendre parler plus souvent de ce pays!
Belle photos Alex, c’est qualité National Geographic ça!
Ahah! Merci Quoc!
merci pour cette belle… description toujours heureuse de te savoir en forme bisous
Ce fut un plaisir!
Salut Alexandre;
Tout d’abord, tes photos de Plitvice en Croatie sont magnifique. Quang j’y suis allé, il n’y avait pas de neige.
J’ai visité la Bosnie Herzégovine il y a 10 ans environ. Ce fut un coup de cœur: le cimetière de Sarajevo +++, Mostar +++.
Tes textes sont toujours agréables à lire.
Bonne continuation
Merci Pierre!! Ça devait être spécial il y a 10 ans!!